Un billet, court, chaque jour.
Romain Gary est l’écrivain de la vie réécrite avec humour, ironie.
Quel plaisir de le voir rejoindre le panthéon imprimé des écrivains qu’est la collection « La Pléiade ».
« La Pléiade », ceux qui, dans la lignée des Ronsard, du Bellay, œuvrent à l’unification de la France et du monde francophile à travers sa langue.
À l’aune de l’expérience de sa propre vie, dans la focale de son regard sans concession sur les bouleversements du monde, des luttes raciales aux États-Unis, des anarchistes de la fin du XIXème aux affres soufferts par l’homme vieillissant et à la virilité déclinante, Romain Gary nous enserre dans les griffes de ses mots.
Et ne nous lâche plus. À vie.
Il a, parmi les premiers, mis les pieds – sa plume acerbe – dans le plat de l’écologie, de la préservation des espèces et de leurs écosystèmes dans le passionnant roman « Les Racines du Ciel ». Il y évoque les inéluctables progression, envahissement et destruction du monde sauvage. En Afrique. Avec la perte irrémédiable des modes de vie et de l’identité Africaine qui vont avec.
« Abe Fields n’avait jamais été particulièrement porté à la contemplation de la nature, mais cette fois, il fallait vraiment admirer. Extraordinaire, émouvante, la végétation de plumes couvrait le marécage à perte de vue et, sous les nuages immobiles et pesants, un deuxième ciel, plus proche, vivant et innombrable, celui-là, semblait avoir triomphé de tout le vide de l’autre. Les oiseaux créaient ainsi , tout près de la terre, un ciel à portée de la main et enfin accessible. »
Romain Gary contrarie notre indifférence quotidienne. Toujours avec poésie et humour, il met sa plume là où cela fait mal et instille dans les petites incises ainsi ouvertes dans notre conscience souvent apathique une encre aux couleurs de sa lucidité, de ses regrets, de ses drames, de ses doutes. Universels.