Un billet, court, chaque jour.
Un maire, en Gironde, veut faire inscrire des « bruits » au Patrimoine immatériel de l’humanité.
Des bruits, qui sont l’essence même des espèces vivantes ; ceux qui constituent la source initiale de musique : le bruit des animaux dans nos campagnes.
S’appesantir sur la nécessité d’une telle requête reviendrait à dénoncer le rapport absurde, qu’ici et là, s’est établi entre l’homme et son environnement.
Comment certains hommes en sont-ils venus à un tel degré de méconnaissance du fonctionnement des espèces vivantes, pour en rejeter une des substances intrinsèques : leur voix ?
Pour s’en sortir avec un peu d’humour, il faudrait détourner de sa petite misogynie sans méchanceté, une chanson (1960) de Serge Gainsbourg et la dédier à cette autre espèce vivante devenue insupportable.
Le moineau pépie
Caquette la poule
Jacasse la pie
Le chameau blatère
Et le hibou hue
Râle la panthère
Et craque la grue
Toi, toi, toi
Toi
Sois belle et tais-toi
La jument hennit
Hulule la chouette
Bêle la brebis
Le crapaud coasse
Piaule le poulet
Le corbeau croasse
Cajole le geai
Toi, toi, toi
Toi
Sois belle et tais-toi
Brait, le lion rugit
Cancane la cane
Le taureau mugit
Le dindon glougloute
Et braille le paon
La caille margotte
Siffle le serpent
Toi, toi, toi
Toi
Sois belle et tais-toi
Le « sois-belle et tais-toi » s’adressant ici, avec dédain, à ceux de l’espèce humaine qui faucheraient sans scrupules tous les trésors sonores de nos vies rurales pour pouvoir s’assourdir sans limite de leur brouhaha technologique ou plus tragiquement encore, gagner deux minutes de sommeil en plus.
« Les uns crient cocorico, très haut, les autres gloussent et caquettent, très bêtes. »
Sans se douter que ces sons « très bêtes », évoqueraient un jour des récriminations humaines.
En fait, il faudrait tout sauvegarder. Sauf ça.