Un billet, court, chaque jour.
Les puechs du Périgord sont d’une esthétique plus rugueuse que les collines tourangelles.
Périgueux n’a pas vu naître de grand poète.
Mais L’Isle et le Loir partagent une semblable poésie printanière, celle des jardins broussailleux où se dissipent des roses fragiles.
La poésie est universelle, elle se retrouve dans tous les jardins, dans toutes les roses.
Quelques fleurs charmeuses accrochent le regard. La tendresse de leur carnation, le velours lisse de leurs pétales ont convoqué Thalie ; quelques vers pour rendre grâce à la minute.
À cette caresse.
« Carpe diem ». Savoure le jour présent et, surtout, la minute présente.
L’un comme l’autre s’éclipse vite.
Les roses se partagent depuis près de cinq siècles la sagesse des vers de Ronsard, pour se rappeler toujours, dans l’éphémère de la belle saison, de briller de toute leur jeunesse, d’éclater de toute leur beauté.
Les corolles fanées de leurs sœurs plus précoces rappellent à leurs sœurs en bouton plus indolentes, la fugacité de leur éclat.
« Mignonne ».
Ronsard fait jouer les mots. Il nous enjoint à savourer une à une, les belles heures de la vie, celles de la jeunesse et de la peau lisse.
« Mignonne, allons voir si la rose
Qui ce matin avait déclose
Sa robe de pourpre au soleil,
A point perdu cette vesprée,
Les plis de sa robe pourprée,
Et son teint au vôtre pareil.
Las ! voyez comme en peu d’espace,
Mignonne, elle a dessus la place
Las, las ses beautés laissé cheoir
Ô vraiment marâtre Nature,
Puis qu’une telle fleur ne dure
Que du matin jusques au soir !
Donc, si vous me croyez, mignonne,
Tandis que votre âge fleuronne
En sa plus verte nouveauté,
Cueillez, cueillez votre jeunesse :
Comme à cette fleur la vieillesse
Fera ternir votre beauté. »
Au bord de L’Isle ce matin, il a fallu laisser Ronsard à ses roses et lui dérober insolemment quelques belles boutures de jeunesse.
Pour les greffer chaque matin aux rameaux du temps qui passe.
Guillemette Callies 