Un billet, court, chaque jour.
«Ceci n’est pas un roman.»
C’est «La Vie Matérielle» de Marguerite Duras, livrée, par elle-même, sans fard au fil des pages.
Un déballage cru de ses affres, tourments, addictions, idées fixes, manies et autres vicissitudes de «La Vie Matérielle», du quotidien.
Se découvre une personnalité fragile, au penchant pour l’alcool peu éventé pour les amateurs aléatoires de son talent.
– «J’ai vécu seule avec l’alcool des étés entiers à Neauphle. (…) Pendant la semaine j’étais seule dans la grande maison, c’est là que l’alcool a pris tout son sens. L’alcool fait résonner la solitude et il finit par faire qu’on la préfère à tout.
Boire ce n’est pas obligatoirement vouloir mourir, non. Mais on ne peut pas boire sans penser qu’on se tue.
Vivre avec l’alcool, c’est vivre avec la mort à portée de main.»
Déprimant au point de se faire une loi rigide de ne jamais boire seul.
Heureusement, Charles Baudelaire a fait du vin, qu’il aimait beaucoup lui aussi, des rimes moins noires que les paragraphes de Marguerite.
Gouleyant au point de se faire une loi gaie de toujours boire en (bonne) compagnie.
Un soir, l’âme du vin chantait dans les bouteilles :
« Homme, vers toi je pousse, ô cher déshérité,
Sous ma prison de verre et mes cires vermeilles,
Un chant plein de lumière et de fraternité !
Je sais combien il faut, sur la colline en flamme,
De peine, de sueur et de soleil cuisant
Pour engendrer ma vie et pour me donner l’âme ;
Mais je ne serai point ingrat ni malfaisant,
Car j’éprouve une joie immense quand je tombe
Dans le gosier d’un homme usé par ses travaux,
Et sa chaude poitrine est une douce tombe
Où je me plais bien mieux que dans mes froids caveaux.
Entends-tu retentir les refrains des dimanches
Et l’espoir qui gazouille en mon sein palpitant ?
Les coudes sur la table et retroussant tes manches,
Tu me glorifieras et tu seras content ;
J’allumerai les yeux de ta femme ravie ;
A ton fils je rendrai sa force et ses couleurs
Et serai pour ce frêle athlète de la vie
L’huile qui raffermit les muscles des lutteurs.
En toi je tomberai, végétale ambroisie,
Grain précieux jeté par l’éternel Semeur,
Pour que de notre amour naisse la poésie
Qui jaillira vers Dieu comme une rare fleur ! »