Un billet, court, chaque jour.
Que ce dialogue érudit, ouvert, honnête est passionnant à lire.
Une Rabbin et un islamologue creusent les fondements de leur religion, sillonnent les piliers de leur foi, non dans un état d’esprit apologétique, mais dans la pure exégèse : l’analyse, l’étude approfondie, historique, sémantique des textes.
Ils nous font regretter l’un et l’autre l’érosion progressive des limites de la laïcité à la française :
– « L’idée qu’on soit invité en permanence à penser avec et contre soi-même, avec et contre son héritage est une idée qui me plaît dans laïcité française. J’y vois la capacité de l’individu à dire « je », contre le « nous » de son appartenance. »
À approcher le judaïsme et le coranisme ainsi, on prend la mesure, avec effroi, des détournements possibles, en l’occurrence avérés, des textes pour contraindre cette possibilité, pourtant constitutionnelle, de dire « je » et de dire « non » à son groupe d’origine religieuse.
– « Dans le judaïsme – et, aussi, dans le christianisme occidental contemporain -, on a l’habitude du travail sur le texte, de la «mise en question du texte. ce n’est pas (encore !) le cas dans l’islam où le travail sur le texte, où le « corps-à-corps » avec lui n’est pas une tradition et n’est pas encouragé. »
On s’aperçoit ainsi qu’au-delà de la harangue, manque cruellement le recul critique sur l’Histoire de ces textes, sur la manière dont ils ont été rédigés, assemblés et sur les développements concomitants des différentes formes de traditions ; variantes de traditions souvent très erronées et bien éloignées de l’essence originelle des textes.
Delphine Horvilleur et Rachid Benzine, emmenés par Jean-Louis Schegel, décortiquent les travers, les abus et les bons usages de ces textes et des traditions.
Il n’y pas un passage, un chapitre, une ligne inutiles et le courage de leurs propos montrent que l’obscurantisme actuel est né du refus pathologique de regarder la réalité historique en face pour dénouer les mensonges des prédicateurs totalitaires.
Delphine Horvilleur conclut son propos avec lucidité :
– « La vérité n’est en effet la propriété de personne, et nos traditions proposent des chemins différents pour s’en approcher. Celui qui dit la posséder est prêt à détruire le monde à coups de certitudes. »
A lire dans toutes les synagogues, dans toutes les mosquées, dans tous les temples et dans toutes les églises.
Peut-être aussi, dans les lycées et les prisons.