Un billet, court, chaque jour.
Au moment où l’on s’assied dans le gros fauteuil d’une salle obscure, on s’attend à quitter un peu le fil du temps, à s’extraire un peu de son quotidien.
Il y a des films magiques qui y parviennent, tant ils sont des rubans de poésie, comme par exemple « Un dimanche à la campagne » de Bertrand Tavernier (1984). Derrière l’image, il y a une histoire, un message à prendre, certainement des leçons de vie et des morales à extraire, mais tous se joue dans l’évocation.
Dans un autre style, « Working Girl » de Mike Nichols (1988), donne à réfléchir sur le pouvoir, la puissance, la réussite, l’ascenseur social. Mais là encore, on quitte son fauteuil par la qualité du jeu des acteurs, on reste dans l’évocation, la libre analyse.
« Late Night » est une excellente comédie.
Emma Thomson joue son rôle dans un pur vernis British ; il n’y a pas une faute de carre.
Ce qui est gênant, dans ce film comme dans beaucoup d’autres depuis une demi-dizaine d’années, c’est qu’on a le sentiment de se faire dicter le sens à y donner.
On rit, on ricane un peu de temps à autre quand même !
Mais c’est du cinéma peu subtilement éducatif.
Le scénario plante un décor de diversité ethnique, de parité homme-femme, de frigidité managériale, de fidélité conjugale.
Toutes les nécessaires préoccupations de notre quotidien.
Malheureusement chaque séquence prend un tour pesant qui finit par vous faire réaliser que le fauteuil dans lequel on est assis n’est pas si confortable, qui vous faire rester sur le même plan avant, pendant et après le film ; vous êtes maintenu sur les basses et triviales réalités du plancher des vaches.
Quitte à recevoir une leçon, j’aurais préféré un bon débat ou une conférence animée.
Là, il y aurait eu du nerf, on aurait pu y croire.
Là, on sort juste complètement penaud de la leçon reçue.