Un billet, court, chaque jour.
À eux deux, ils devaient cumuler plus d’un siècle.
Je ne fais pas référence au couple de cygnes, qui malgré le rythme de ma course, m’a conduit à m’arrêter, à revenir sur mes pas, pour immortaliser leur pose.
Eux, je ne sais pas ce qu’il se passe dans leur tête.
Mais c’était amusant de voir que l’un s’affichait, l’autre se dissimulait.
Exactement comme le couple de plus de cent ans à eux deux qui les admirait ; lui jovial et disert, elle timide et empruntée.
À moins qu’ils ne se soient reconnus eux-mêmes, comme dans un miroir, dans le spectacle de nature vivante de ces deux anatidæ.
Leur petit cinéma, quand nous avons échangé quelques mots, en disait long sur la fraîcheur de leur idylle.
– « J’ai de la chance, je suis heureux, je suis amoureux », émanait du verbiage de Léon.
– « Je suis amoureuse, c’est incroyable, ça m’arrive à moi », s’échappait de la timide expression de Léone.
Léon, Léone.
C’est ainsi que j’ai choisi de les prénommer.
Je ne sais rien d’eux et n’en saurai jamais rien.
Mais de balancer les yeux, du couple de cygnes au couple d’amoureux, j’ai remarqué qu’il y avait une similitude d’attitudes.
Lui, Léon et lui, le cygne, s’affichent, paradent et bombent leur torse.
Elle, Léone et elle, le cygne, minaudent et effacent leur visage pour cacher leur plaisir.
Cela sentait le bonheur chapardé au détour d’une vie déjà longue, un reviens-y de cachotteries comme si des parents-fantômes pouvaient soudainement apparaître pour mettre bon ordre à ce flirt.
Cela sentait le « Chéri, Chérie », un petit air d’amourette sous le soleil d’automne.
Un refrain de jeunesse :
« Oh! chéri chéri(e)
La musique de ma vie
C’est du soleil
C’est à moi qu’il le dit
Je t’aime, je t’aime
C’est ta main dans la mienne »
Guillemette Callies 