Un billet, court, chaque jour.
Quel est ce mot ?
Ce mot nouveau !
Un mot nouveau : « dazibaos » !
Je reprends le texte.
Comme une bonne élève, je cherche le contexte.
– « Et puis, sur cette grande écritoire on pouvait lire des mises en garde plus ciblées, des dazibaos comme : Godard, le plus con des Suisses pro-Chinois »*.
Cela sent l’insulte, cela fleure l’anathème.
Comme une élève studieuse, j’ouvre mon dictionnaire.
Il est trop vieux, mon vieux Robert.
Je poursuis sur la toile.
Et j’y trouve de quoi nourrir ma curiosité.
– « dazibaos » : affiche, annonce, enseigne, placard, publicité.
– « dazibaos » : en Chine, une affiche rédigée par un simple citoyen, traitant d’un sujet politique ou moral et placardée pour être lue par le public.
– « dazibaos » : par extension, et au sens figuré, employé pour désigner des publications non officielles.
Bref, un joli mot amusant à l’oreille pour évoquer le mode d’expression, traditionnel en Chine impériale et post-impériale, des citoyens mécontents qui écrivaient ou imprimaient des affiches pour critiquer l’administration du magistrat impérial.
Le peuple se rassemblait autour des affiches pour les commenter.
C’est sous le régime communiste de Mao Zedong que cette façon de vitupérer le pouvoir refit surface.
Il semblerait même que ce support, c’est à dire, être attaqué dans une « affiche de grand caractère », était suffisant pour mettre fin à une carrière.
Je comprends maintenant pourquoi Godard est resté un cinéaste confidentiel pour intellectuels en vase clos.
Je regrette que ce soit une si vilaine révolution qui ait véhiculé jusqu’à mes lectures un mot aussi exotique et croustillant.
* Jean-Paul Dubois, « Tous les hommes n’habitent pas le monde de la même façon »
Guillemette Callies 