365 Nuances de 2019 – #314 – «Mauvais Cultivateurs»

Un billet, court, chaque jour.

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Tout le film, « Les Misérables » de Ladj Ly, repose sur une morale, tirée du roman éponyme de Victor Hugo :
– « Mes amis, retenez ceci : il n’y a ni mauvaises herbes, ni mauvais hommes, il n’y a que de mauvais cultivateurs. »

Le film, techniquement, est une réussite.
Je ne vous raconterai pas l’histoire, vous avez les mêmes, en boucle, tous les jours, dans tous les journaux et sur toutes les chaînes d’information.

Des populations qui vivent dans des cités, des populations abreuvées de subventions qui servent à tout sauf à construire, maintenir, entretenir, développer un cadre de vie ne serait-ce que propre, des populations confites dans un chômage endémique, des enfants livrés à eux-mêmes et par leurs parents et par les encadrements sociaux.

Les seules lois sont celles des caïds, des malfrats et des prêcheurs.

Autrement, moralement, le film est une honte.
«C’est pas nous, c’est eux ! »

Une honte parce qu’il laisse supposer que l’entière responsabilité de ce chaos reposerait sur la Société qui se désintéresserait complètement d’une de ses composantes, sur l’État et ses Services, évidemment en premier lieu ceux de la Police, qui serait responsables de cette déliquescence sociale, de cette imperméabilité à toute éducation scolaire, de cette dé-civilisation, de cette absence de repères et de limites, du délabrement de l’habitat et des lieux publics.

En creux, en négatif, le film révèle un manque social invraisemblable et illustre, certainement sans l’avoir voulu, l’irresponsabilité des populations elles-mêmes.

Le manque social invraisemblable, c’est l’absence totale de figures féminines.
Où sont les femmes dans ce film, sinon trois adolescentes fumeuses de joints, sinon trois adolescentes-caïds, sinon deux mères, l’une hystérique, l’autre in-assimilée.
Si le désengagement public, de l’État, est manifeste – là le film ne nous apprend rien que nous ne sachions déjà -, il montre que la femme, dans ces cités, est exclue de la voie publique, de la vie sociale.
Le film montre une société quasi exclusivement masculine où la testostérone fait la loi.

L’irresponsabilité des populations elles-mêmes, c’est de croire que tout dépend, tout doit venir de l’État, de la Collectivité et qu’elle ne se doit rien à elle-même.
Le film montre que ces populations préfèrent s’en remettre à des acteurs de l’illégalité, du communautarisme, du banditisme.
Ils ont choisi de s’appuyer sur ces lois-là, plutôt que sur celles de la République.
Dans l’un comme dans l’autre cas, ils attendent le salut, leur salut, de l’extérieur, de la manne financière de la Communauté nationale ou de l’emprise d’une pègre mafio-religieuse.

Dans ce film, le principe de responsabilité est complètement absent.
Si la situation est à ce point dégradée, c’est la faute de tous, de tout le monde, sauf de la sienne.

Alors, on peut citer Victor Hugo, tous les plumitifs et tous les orateurs, on peut envoyer tous les meilleurs cultivateurs de la planète au secours de ces royaumes du drame, qu’ils ne pourront rien changer que les mauvaises herbes, les mauvais hommes n’aient décidé de changer en se changeant eux-mêmes.

Plus laconiquement, sans dédouaner l’État de sa responsabilité patente, il y en a assez de ces propagandes stériles du misérabilisme volontaire.

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