Odyssée 2021 (#12) – « Laissons Jean-Baptiste à Lachaise »

La petite légende voudrait que ce soit à Molière que l’on doive les trois coups du « brigadier », ces trois coups magiques qui figent le spectateur en l’attente du lever de rideau.
Cette légende dit aussi qu’ils avaient pour office d’invoquer l’indulgence de l’Église sur ce qui se jouait sur les planches.

Un coup « au nom du Père », au nom du « Roi » chez Molière,
Un coup « au nom du Fils », au nom de la « Reine »,
Un coup « au nom du Saint-Esprit », au nom du « Dauphin ».

Une époque où, à la scène, on ne se prenait ni pour Dieu, ni pour son envoyé sur cette Terre.

Molière voudrait-il être transféré au Panthéon ?
Alors qu’Armande, sa chère et tendre, eût tant de mal à le faire inhumer dans le cimetière de la Chapelle Saint-Joseph.

« Mardi 21 février 1673, sur les neuf heures du soir, l’on a fait le convoi de Jean-Baptiste Poquelin Molière, tapissier, valet de chambre, illustre comédien, sans autre pompe sinon de trois ecclésiastiques ; quatre prêtres ont porté le corps dans une bière de bois couverte du poêle des tapissiers ; six enfants bleus portant six cierges dans six chandeliers d’argent ; plusieurs laquais portant des flambeaux de cire blanche allumés. Le corps pris rue de Richelieu devant l’hôtel de Crussol, a été porté au cimetière de Saint-Joseph et enterré au pied de la croix. Il y avait grande foule de peuple et l’on a fait distribution de mille à douze cents livres aux pauvres qui s’y sont trouvés, à chacun cinq sols. Ledit sieur Molière était décédé le vendredi au soir 17 février 1673. Monsieur l’Archevêque avait ordonné qu’il fût ainsi enterré sans aucune pompe, et même défendu aux curés et religieux de ce diocèse de faire aucun service pour lui. Néanmoins l’on a ordonné quantité de messes pour le défunt. »

« Sans autre pompe ».  C’est ce qu’il faut retenir.
À la Révolution, en 1792, puis de nouveau en 1816, Molière fut « déménagé ».  D’abord au « Musée des Monuments Français » et définitivement au cimetière du Père Lachaise.
Au « Lachaise » ?  Certainement une litote de la République.
La chaise.  C’est d’abord celle sur laquelle Jean-Baptiste Poquelin aurait rencontré l’éternité, et son Créateur, qui trône et qui rappelle son génie aux visiteurs de la Comédie Française.

Son génie.  Sa gloire.
Qui peut parier à sa place sur ce que Molière aurait voulu en faire ?
A tout parier, au sens de votre dévouée chroniqueuse, il aurait voulu qu’on le déclame, qu’on le joue, qu’on rit de ses tirades, qu’on joue ses pièces sans trembler devant la « cancel culture ».
Et que chaque enfant de France, sache pleinement qui il fut et qui il est encore dans notre, justement merveilleuse, Culture.

Il paraît curieux de tant malmener le Théâtre ces derniers mois et de vouloir se servir de la plus éminente de ses plumes pour en tirer gloire.
« Gloriole » aurait dit l’Artiste !

Votre commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s