
Il y a près de huit différentes manières de l’écrire.
« Chakchouka », « chektchouka » et enfin, celle qui a amusé l’attention : « Tchoutchouka », tant, du point de vue phonique, sa prononciation met l’appétit en train.
Il y a aussi le joli mot juif qui nomme ce plat : « tastira ».
C’est sans doute cette dernière dénomination qu’il faudrait retenir car ce sont les Juifs du Maroc, d’Algérie, de Tunisie et de Lybie qui ont transmis la tradition de ce plat dans tout le Proche-Orient, dans lequel on peut inclure la Turquie ; cette dernière étant bien de cette région-là, elle n’a rien d’européenne.
Il y a bien longtemps, une langue commune irriguait ces rives du bassin méditerranéen : le berbère, elle-même imprégnée de vocabulaire punique où se retrouve le verbe « shakshek » qui signifie mélanger.
Beaucoup de linguistique et d’archéologie gastronomiques pour une petite merveille gustative qui enchante le palais et qui, occupant toutes les papilles, laisse en repos la langue et ses bavardages, devenus, le temps de la dégustation, tout à fait inutiles.
La recette définitive, quasi officielle, n’aurait conquis ses lettres de noblesse qu’au XVIème siècle, avec l’introduction par les Espagnols, en Occident, puis dans le reste du Maghreb, des poivrons découverts au Mexique. Les poivrons s’invitent dans la « tastira » juste après la tomate qui provient aussi, après un long et tortueux périple sud-américain, du Mexique.
Voilà l’histoire ensoleillée et voyageuse de ce régal bien chaud auquel il n’y a qu’une seule manière de rendre hommage : s’en repaître sans façon sous l’œil bienveillant du cuisinier : Maître Jean, ici, en l’occurrence.