
Nous sommes tous à y penser, plus ou moins secrètement, à longueur de journées, de week-end ensoleillés, où il ferait bon, comme dans « le bon vieux temps », qui ne date jamais que d’il y a un an, s’attabler à une terrasse, à la table d’une belle enseigne au menu soigné, s’accouder à un zinc, siroter un petit noir en devisant avec le patron.
« Plus ou moins secrètement » est devenu la règle.
Cela ressemble à une expression courante qui nous agace tous :
– « Je dis ça, je dis rien ! »
Un charmant journaliste, Quentin Périnel, en 2016, avait rédigé une amusante chronique sur cette saillie qui nous horripile tant elle est la démonstration d’une certaine lâcheté, de la peur d’imposer son opinion, de ne pas assumer un reproche.
Les terrasses vides, les salles aux tables retournées prenant la poussière, le réflexe d’emmener sa chérie pour un tête à tête amoureux, l’habitude de retrouver une amie tôt le matin autour d’un express pour bien commencer la journée, le but de promenade pour un régal bien mérité après l’effort ou une descente à ski, la fin de semaine autour d’un bock pour se lâcher un peu en chargeant son taux d’alcoolémie.
Tout cela nous désole et nous manque terriblement.
Mais on ne peut pas le dire.
Au risque de prendre une remarque acerbe de la part de citoyens zélés.
Mais on ne peut pas dire ce doute qui nous taraude : que si les bars, les restaurants, étaient véritablement la source indiscutable de la propagation du virus, alors celui-ci aurait franchement marqué le pas.
Mais, à presque un an jour pour jour du 1er confinement, force est de constater que même sans ces lieux de gourmandise, de partage et de joie, le virus prospère quand même.
Je vous rassure.
– « Je dis ça, je dis rien ! »
Mais si ! En fait, j’assume ce doute. Sans douter longtemps que beaucoup partage le même doute.