
Lors d’un merveilleux voyage-épopée en Grèce, une virée mémorable pour mes deux enfants, bien jeunes à l’époque, l’une des distractions pendant les trajets routiers fut de décrypter les lettres de l’alphabet grec.
Rien ne les y obligeait, puisque la version en alphabet latin moderne était proposée en sous-titre.
α – β – δ – π – alpha, bêta, delta, pi
Quelle joie quand ils réussirent à déchiffrer « ευχαριστώ » : « merci »
Cela n’a fait d’eux ni des « Homère », ni des « Hélène », mais cela leur a permis de se sentir des petits Sherlock Holmes ou des graines de Champollion.
Il est amusant, pour ne pas dire tout à fait paradoxal, qu’à l’heure où les enfants sont sensés devenir des futurs « génies-geek » en se formant au codage informatique (cf. Site de l’Éducation Nationale), il soit prévu de les priver du plus ludique de ces systèmes : la numérotation en chiffres romains.
D’ailleurs, tout est code.
Les lettres que vous lisez, les chiffres qui permettent de tracer trois signes au lieu de dessiner 100 chameaux, le code de la route qui permet de comprendre les règles par analogie imagière, les notes qui permettent d’immortaliser la musique.
La déperdition des savoirs culturels fondamentaux est abyssale.
Peu de jeunes sont aujourd’hui capables de comprendre une œuvre d’Art, peinte ou sculptée ; ils ignorent presque tous la symbolique des couleurs, de la mythologie, de la chrétienté.
Il semble même que l’illettrisme, le simple fait de donner leur sens aux lettres de leur propre alphabet, regagne du terrain non seulement chez les enfants, mais dans l’ensemble des classes d’âges, après avoir représenté la plus grande victoire civilisationnelle de l’ère moderne sur l’ignorance et la plus noble bataille des « Hussards de la République » que furent feus les instituteurs et feus les institutrices.
Est-ce le « signe », sinon la preuve d’un renoncement total à faire fonctionner, ne serait-ce que par et pour le jeu, leurs intelligences ?
Ou, pire, la volonté de fabriquer en masse, des idiots ?
Qui ne sera pas, et n’est pas déjà, effondré devant le spectacle d’un enfant ou d’un adulte, lisant le titre du Roi Soleil : « Louis icx-bâton-vé » !
Dans peu, personne ne saura même ce qu’est un crayon !
Ah les pauvres premiers hommes des cavernes et leur art pariétal ! Ils se seront bien donnés du mal pour qu’on en arrive là !