Odyssée 2021 (#185) – « Une (bonne) raison »

Le son âpre du réveil n’était pas le bienvenu ce matin à 5 :30.  Pas bienvenu du tout même.  Après les 45 kilomètres de trail de la veille, le meilleur endroit du monde était bien le pli moelleux de l’oreiller et le doux poids caressant de la couette.
Les sentiments de confort et de laisser-aller profonds ont été décalaminés d’un coup brutal.  Pas sournois, puisque c’est moi-même qui avait réglé l’heure de la sentence la veille.
À y repenser, je ne me souhaitais initialement pas tant de mal.

Alors, il fallait une raison, bien plus certainement une « bonne raison » pour se désincarcérer de ce nid.
La « bonne raison » était, de coureur devenir « pisteur ».

C’est quoi un « pisteur » ?
Celui qui montre la piste, la direction, le chemin à prendre.
Celui qui assure la fluidité, protège des petits dangers intempestifs : un chien trop démonstratif, un cycliste à contre-sens.
Celui qui se met au service des coureurs, qui les encourage de la voix, qui leur tire un sourire au cœur de l’effort.
Un « pisteur », c’est aussi un « balayeur ».
Celui qui attend – patiemment – le dernier coureur, qui s’ancre derrière lui, lui assure une certaine sécurité jusqu’au bout et l’amène à bon port.

C’est amusant de faire cela.
– « Allez courage, tenez le rythme ! »
– « Souriez, ce sera plus facile ! »
– « Bravo, bravo ; vous aurez la ligne ! »
La voix s’éraille à force de trilles et les mains chauffent à force d’applaudissements.

Le pli moelleux de l’oreiller et le doux poids caressant de la couette sont vite oubliés quand on se sent au bon endroit, quand on se sent, un minimum, utile.
D’autant qu’on leur a promis un prompt retour ; une promesse de sacrée sieste.  Sans la censure du réveil cette fois-ci !