
Paris prend des airs de village ces derniers jours. Les rues se clairsement de ses habitants ; ceux qui restent et baguenaudent dans les rues, même autochtones, adoptent des allures de vacanciers.
Le ciel, capricieux, ajoute à l’atmosphère dilettante.
Les troquets s’étendent sur le pavé et rivalisent de charme. Seules les voix des dîneurs résonnent contre les façades aux volets souvent clos.
Le murmure de la circulation semble loin, une houle à peine perceptible. Une lumière vespérale, déjà dans les adieux au solstice d’été, à peine atténuée par des nuages chargés d’eau, baigne les tables où de petites veilleuses déploient leurs premières ombres.
Les conversations sont feutrées, mais, çà et là, des traits de bonne humeur, des jets de rires résonnent comme la baguette sur un triangle.
Les gens sont heureux de profiter du soir, de se tenir à table sans guinde ni cérémonie.
Le serveur, expert de sa clientèle, sait ce qu’il peut lui demander. D’une main il porte une belle assiette où trône un délicieux dessert au chocolat, de l’autre, courbée comme une cloche, il protège la flamme d’une bougie.
D’une voix aiguë mais ferme, il invite la compagnie à entonner avec lui l’hymne des années qui passent : un « joyeux anniversaire » enflammé.
« C’est une complète réussite. Tous le suivent et reprennent en chœur. »
La récipiendaire jubile. La surprise, un peu éventée par les simagrées de ses comparses de table, gagne malgré tout son pari : un moment de joie à l’unisson de tablées qui ne se connaissent pas.
Tous ressentent l’importance des bonheurs fugaces, qu’il faut sans manières laisser venir à sa table et avec entrain laisser s’égailler entre les tablées.