Odyssée 2021 (#315) – « Le bruit rassurant du lave-linge »

Là, je touche le fond. Dans un précédent billet, j’évoquais, en termes bien plus philosophiques, toutes les choses qui, dans la vie, privent d’une pensée élevée ; le sort me le rend bien. Avec moi, donc, vous allez entrer dans le contingent profond, dans le matériel affligeant, le manuel basique et le vil domestique : la lessive.

Oui ! Hélas, trois fois hélas, mon lave-linge, cette mécanique miraculeuse, fait des siennes et a décidé de ne fonctionner que partiellement. Subséquemment, je ne suis plus que partiellement occupée par des pensées élevées. Je rase terre même : je suis allée à la laverie.
Oh ! Ce n’est plus l’enfer d’autrefois où, il fallait d’abord dévaliser les commerçants alentour pour mendier des pièces de monnaie pour nourrir les « bêtes ». On paie sans contact désormais. Le plus important est de ne pas oublier la lessive. Combien de fois, une fois le linge bien installé dans le tambour, ai-je réalisé qu’il manquait le détergent ! Dans ce cas-là, avec un peu de chance, il est possible de mendier un peu de « poudre » aux « co-mères-Denis » présentes mais dans la déveine, seule dans le local, il n’y a que deux choix possibles : laver sans lessive ou reprendre son bazar et retourner chez soi.

Mais, car il y a un mais, il y a tout de même deux aspects positifs à cette malencontreuse corvée. Le premier est de réaliser l’irremplaçable service que rend ce cube aux entrailles métalliques et dentelées : le lave-linge. Comment faisaient nos arrière-grand-mères ? Franchement, je comprends qu’en ce temps-là on ne leur laissait pas le temps d’aller à l’école apprendre des choses élevées ! Le second est que les quarante-cinq minutes que dure le cycle de lavage est du temps libre pour quand même s’adonner à une activité élevée : lire.
J’ai pu dévorer un bon quart de roman japonais, certes mal assise sur un truc indûment appelé chaise, mais sans être aucunement dérangée. Comme il n’y a aucune alarme pour annoncer la libération du linge, j’ai failli rester toute la soirée immobile, avec le seul geste de tourner les pages, face aux hublots impassibles.

Faire contre mauvaise fortune, bon cœur : le sort, en somme, n’est pas si terrible. Mais bon, l’enfant trop gâtée par l’électro-ménager que je suis devenue, se serait bien contenté de lire le même roman, affalée sur son canapé avec en sourdine le bruit rassurant du lave-linge au travail.

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