« Flâneries 2023 » – # 27 – « Craquer pour Anna »

Tous droits réservés et tous mes remerciements aux Éditions Bartillat


L’objectif de départ était seulement de se procurer « Que ma joie demeure » de Jean Giono. C’est un aléa fréquent du lecteur assidu, de l’écrivain studieux, au cours de ses pérégrinations, au fil de ses recherches, que de tomber de Charybde en Scylla. C’est-à-dire que, pourtant déjà bien nourri de littérature et de notes, possédé par elles, appâté par des allusions à des œuvres inconnues et à des références alléchantes, il se précipite chez Scylla, plus communément appelé libraire.

Il aurait fallu, impassible, aller récupérer directement sa commande, ne pas loucher sur les rayons et autres étals remplis de tentations, comme l’étagère des nouveautés en poésie. Mais ce serait là présumer déraisonnablement de la capacité de volonté, de la force des ressorts de résistance. L’une et l’autre très faibles et très peu aguerries. Impossible de résister à la quatrième de couverture : « La voix si touchante d’Anna de Noailles a charmé ceux et celles qui l’ont approchée ou lue. »

Force est de découvrir, de plonger dans la douceur des mots, de se laisser prendre dans les rets de la rime de cette aristocrate, de cette délicate poétesse ; seul en donner un extrait à lire permettra d’en juger :

« Épuisez, cependant que vous êtes fidèles,
La chaude déraison,
Vous ne garderez pas vos amours éternelles
Jusqu’à l’autre saison.

Le vent qui vient mêler ou disjoindre les branches
A de moins brusques bonds
Que le désir qui fait que les êtres se penchent
L’un vers l’autre et s’en vont. »
(Le baiser, in « Le cœur innombrable », 1901)

Implacable, cruelle, loi de l’amour, promulguée avec douceur, qui alerte les cœurs brûlants sans trop les freiner cependant. Ainsi va la vie, ainsi vont les sentiments ; c’est un risque à prendre pour l’embrasser, les goûter intensément.

Scylla se définit comme « mal éternel, terrible fléau, réalité sauvage et qu’on ne peut combattre ». La poésie de l’amour et l’amour de la poésie, par eux vaincu d’avance, qu’il est délicieux d’y céder.

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