
Image des Champs Élysées ; années 60, 70 : peu importe. Cette image est apparue dans le fil d’actualité d’une page de réseau social, là où on trouve de tout et souvent n’importe quoi. Dans cette masse qui assaille le regard et l’esprit, elle s’est démarquée pour une raison très simple, pour un motif que l’on a perdu de vue depuis pas mal de temps : l’élégance. Il ne s’agit pas seulement de s’attacher aux vêtures, mais à l’ensemble ; il règne dans cette vue de la plus belle avenue du monde, beaucoup d’ordre, de netteté, d’harmonie, qui sont des déclinaisons de l’élégance. Il semble que tous, dans la foule de badauds, dans l’alignement des clients attablés en terrasse aux guéridons, fournissent un effort de tenue. Chacun porte beau, chacun déambule sans gêner les autres, chacun se tient correctement à table. Les trottoirs sont impeccables. Il n’y a pas de mendiants, de saltimbanques, de vendeurs à la sauvette. Il n’y a pas de jeans troués, de jogging poutre-apparente, de nombril à l’air, de peaux couvertes de tatouages, de piercings sur les visages, de cheveux multicolores. Il n’y a pas de pieds sur les chaises, de corps arcboutés sur des mobiles.
Où sont passés la tenue, le savoir-vivre ? Certes, c’est une somme de contraintes, un cumul de gestes et rituels à s’imposer pour « paraître » dans le monde. Mais, au-delà d’habitudes qui deviennent naturelles autant qu’elles aient été acquises tôt, dès l’enfance avec l’éducation et l’exemple familial, cela donne à voir un sentiment de respect mutuel qui prend racine dans le respect que chacun a de sa propre personne. Souvent, chacun peut être amené à se demander, à propos des évolutions de la société qui l’entoure, à commencer par ses expressions vestimentaires et comportementales, si nous ne sommes pas entrés en décadence. À comparer cette image et celle que l’on pourrait saisir aujourd’hui au même endroit, il n’y aurait pas de doute possible : la décivilisation est bien amorcée.