C’est une course à faire pour une tierce personne qui a conduit mes pas vers les Puces de Paris et m’a permis de remonter le temps, de plonger dans le décor de plaisirs oubliés, celui de musarder, de baguenauder sans motif précis, simplement pour se rincer l’œil à moindre frais au milieu de trésors, de merveilles, d’objets hétéroclites.
« C’est le plus grand musée gratuit au monde » me lance un boutiquier ! C’est vrai : d’une allée à l’autre, d’une échoppe à l’autre, d’un déballage à l’autre, on change de salle, d’époque, de style, de saison, on passe de la table au salon, de la bibliothèque au jardin, de la cuisine au cabinet du curiosité. Dans la halle Serpette, j’avais rendez-vous avec un spécialiste des serrures, ferronneries et décors mobiliers en bronze : une caverne à trésors et surtout à mots oubliés : espagnolette, crémone, heurtoirs, pommeau. Chaque pièce possède un usage, une histoire et des secrets de fabrication, ceux de la crème des artisans d’art, fleurons de la France du bon goût, de l’élégance raffinée.
L’atmosphère, comme celle d’un village aux us et coutumes à nuls autres pareils, se ressent comme celle d’un havre : une exclusion du temps, d’une confrérie : amitié, secrets et entraide et d’une cocagne : seuls le plaisir des yeux, la surprise et l’abondance comptent.
On voudrait en être pour pouvoir ouvrir toutes les réserves, manipuler toutes les babioles, aller au fond des armoires. On rêve de demeures aux pièces vides et aux murs nus, aux parcs ponctués de bosquets, pour y déposer telle bergère aux coussins soyeux, y accrocher tel portrait d’ancêtre, y cacher telle Vénus usée par le temps et le vent.
Ballade réconfortante, petit café en terrasse pour jouir du décor, éveil d’anciennes passions, celle du beau, de la belle ouvrage, de la magie du travail de la main et de la fantaisie du luxe et un peu d’envie envieuse, gage de nuits de princesse dispendieuse aux mille châteaux somptueux.
Guillemette Callies 