
Adamant signifie solide. Une phrase de vieux français définit ainsi ce vocable : « le adamant ne puet estre brisié ne froissié ne desprecié ». Pourtant, sur la barge amarrée aux quais de la Seine très à l’est de Paris, y passent du temps des têtes un peu cassées. Le documentaire Sur l’Adamant nous en dresse les portraits. Si le vaisseau est solide, les personnages ne le sont pas.
Tout repose même dans l’expression, d’abord sous forme de brefs témoignages, ensuite par le biais de séquences centrées sur les différents ateliers proposés aux résidents, de ces extrêmes fragilités. C’est d’ailleurs avec une chanson du groupe Téléphone, Bombe humaine, vocalisée par une de ces têtes cassées, que l’on comprend l’agitation, l’angoisse qui imprègnent le cerveau de ces personnes :
« Je vois à l’intérieur des images, des couleurs
Qui ne sont pas à moi qui parfois me font peur
Sensations qui peuvent me rendre fou. »
Sont à retenir quelques phrases importantes prononcées par ces autres-nous, ces personnalités émouvantes dans l’acuité qu’elles ont de leurs maladies. « Si j’avais une baguette magique » ; tous en voudraient une pour retrouver une sensibilité normale, résistante, résiliente aux interactions avec leur environnement et leurs semblables. Tous ont le sentiment d’avoir « perdu leur liberté » ; sans les prises de médicaments, aucun ne serait capable d’avoir des activités en dehors d’un univers strictement médico-psychiatrique. Une baguette magique leur permettrait de chasser leurs terreurs, les voix qui les hantent, de se servir pleinement de leurs aptitudes intellectuelles et physiques, de déployer leurs réels talents artistiques et, tout simplement, d’être un comme tout le monde avec une vie active et sociale heureuse.
L’association qui a élu domicile sur l’Adamant et qui accompagne ces têtes cassées, mobilise de ses résidents toutes les facultés et talents. Autant que possible, elle les fait agir dans toutes sortes d’activités, bien sûr artistiques, mais aussi très matérielles, quotidiennes. La chanson du groupe Téléphone illustre bien cette nécessité de se prendre en main, de refaire de soi un acteur de son destin, même très cabossé, pour ne pas sombrer :
« La bombe humaine, c’est toi elle t’appartient
Si tu laisses quelqu’un prendre en main ton destin.
C’est la fin »