
Quelques kilomètres de Paris, le monde change, le monde s’ouvre. Rien ne contrarie le regard ; le printemps, en plein épanouissement, enchante le tableau. Dans un sentier creux, le paysage joue de coquetterie, il borde la soie sauvage de ses prairies céladon de rubans dorés, tissés de fleurs de colza qui ondulent mollement sous la caresse légère du vent. Soie, étoffe précieuse mouchetée d’aigrettes éthérées. Celles-ci n’attendent que le souffle taquin du promeneur pour s’égayer aux quatre points. Ici en ruban, plus loin en débauche d’étoffes immenses, les champs déploient de l’or à l’horizon. Des parfums chauds, sucrés comme du miel, accompagnent le pas. Le gazouillis de tout un orchestre de piafs invisibles est animé, comme le ferait un soliste, par l’appel amoureux d’un coucou, tout aussi indécelable. L’air, encore indécis à cette heure matutinale, mêle subtilement la fraîcheur résiduelle de la nuit et la chaleur timide des premiers rayons de soleil. Il ne faut plus que glisser dans cette prose, rimer avec elle d’une allure discrète et pieuse.