« Flâneries 2023 » – # 122 – « Faire plaisir »


Il y a de l’Amélie Poulain en chacun de nous, une fibre de bête à bon Dieu, ces petits mouvements du bon du cœur, qui, comme l’envol de ce gracieux coléoptère à pois noirs sur fond rouge, procurent un bonheur certes fugace, mais fécond au long cours. Accompagner une vieille amie à la plage en fut une illustration, celle de faire plaisir sans aucun artifice.

Des jours avant, elle s’en fit une joie, fébrile. Le projet, à peine énoncé, revint à un « en voiture Simone », à une promesse de bon temps, de récréation dans une vie par toujours très enthousiasmante d’octogénaire. Tous les petits maux, les perfides idées sombres, seraient balayés par le vent marin. Ce fut encore mieux qu’espéré puisque le ciel avait décrété une tempête de bleu presque sans nuages.

Déjeuner au bord de la plage de sable blond, sur une table bien dressée, servi par un garçon très affable, égayé par les cris perçants des enfants en vacances. Tout n’aurait pas été bien cuisiné que cela aurait été bon quand même parce que la joie transforme tout, y compris les dispositions des papilles qu’aucun chagrin des affres de la vieillesse ne peut alors contrarier.

La béquille si agaçante en temps ordinaire, supplétif de mouvements grippés par les ans, se fit oublier presque complètement au point de devenir l’appui gestuel d’une conversation animée. Plus rien n’est un problème, tout devient aubaine : la longue file d’attente devant le glacier, les cyclistes débutants et les embardées de leurs engins sur les planches, les accoutrements plus ou moins de bon goût des promeneurs venus des quatre coins de France et souvent des quatre coins du monde. Tout coule, tout devient fête pour les yeux.

Être au service de tout cela, adoucir tous les instants, prévenir le moindre effort, arrondir sa conduite : cultiver la sérénité de l’instant. Après les kilomètres des Planches de Deauville, sous un soleil aux rayons légers de printemps, caressée par une brise souple et tendre, la belle héroïne de ce petit périple, s’endormit dans l’auto, dans le repli confortable de son siège, repue d’émotions.

Il y aura eu cette journée, il y aura eu tous les jours d’avant à s’en impatienter et il y aura tous les jours suivants à s’en féliciter.

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