
Si fripées qu’il a fallu à l’œil un peu de science pour reconstituer leur identité originelle. Coupées, elles ont résisté au flétrissement autant qu’il leur est resté de sève et de force pour se nourrir d’un peu de l’eau du vase et de la lumière du jour. Mais, « las ! las ! », elles ont leurs « beautez laissé cheoir 1 ». Pierre de Ronsard rappellent que nos vies ne valent guère mieux que ce que durent les fleurs ; ses vers sont des stances au temps qui passe, des rappels poétiques à un peu d’humilité. La fugacité de la vie, celle de la beauté des fleurs, inspire de marquer le temps autrement que par l’apparence, bien plutôt de le façonner du bon de nos âmes et d’ameublir ainsi le souvenir que nous laisserons à ceux qui nous succèderont. Même fanées, les fleurs d’un bouquet conservent un pouvoir d’évocation : l’éclat de leur couleur, la grâce de leur allure, la délicatesse de leur parfum. « La matière demeure, et la forme se perd 2 » : la matière de l’homme, celle qui dure, se transmet et fructifie, c’est la bonté.
1 – Pierre de Ronsard, « Mignonne, allons voir si la rose … »
2 – Pierre de Ronsard, « Élégie »