L’œil choisit, l’œil trie ; il saisit ce que l’esprit lui demande, selon son inclination. La si belle lumière printanière rend le cœur heureux, l’ouvre à tout signe qui réponde à son appétit sentimental. Ici une branche de cerisier en fleur, ici de fières iris dressées par leur jeune sève, là des grappes de lilas poussent leurs ultimes thyrses, minuscules améthystes que le temps ternit doucement. Le vert puissant des pelouses, des ramures, gonflées de pluie et irisées de soleil, disperse son énergie, émerveille le promeneur. Le « Baiser » s’offre au regard, suspend le pas. Enchâssé dans un roc, un couple enlacé semble ne jamais vouloir se déprendre. L’inclinaison est douce, consentie, sans entrave ; l’union semble éternelle. L’œil s’empare de cet abandon amoureux, le temps se suspend ; un tel élan semble toujours avoir existé. Et l’esprit, simple et confiant, ne parvient pas un instant à en douter.
Guillemette Callies 