
C’est une petite scène cocasse de la consommation ordinaire que vous allez retrouver là. Plus précisément, celle du choc créé par l’envie contrée par la lucidité.
Dans les charmantes rues du Marais, au cœur du Paris préservé des folies de architecturales, du navrant carreau de salle de bain au vaniteux effets de l’acier et du verre, qui la défigurent, se cache un repaire, une sorte de caverne aux friandises. Certes, il ne s’agit pas là de nos Bergamotes, de nos Bêtises, de nos Calissons ou de nos Roseaux du Lac. Il s’agit plus exactement ici de l’art sucrio-chimico-industriel anglo-saxon.
Il faut avouer que, bien que cocardière sur tous ces sujets, la mise en scène de ces alléchants packagings, rangés en régiments triomphants sous les néons éblouissant, a produit un effet prégnant sur ma volonté. Certains de ces délices me sont déjà bien connus pour les avoir croisés lors de mes (nombreux) écarts d’intempérance.

J’allais, de ma main incontrôlable et incontrôlée, fondre sur les confiseries, en particulier sur les tubes de bubble-gum rose poudré et non moins en particulier sur les grenouilles Harry Potter, quand mon œil, ultime défense de cette vertu cardinale qu’est la tempérance, ajusta l’étiquette du prix des batraciens en chocolat.
5,90€ l’unité.
Quel choc ! Quel drame ! Quel coup bas !
Quelle inflation honteuse et abusive !
Alors, cinglant, le cri du cœur a jailli des tréfonds de ma déception :
– « Quoi ? Cinq euros quatre-vingt-dix ! »
J’ai filé incontinent. Sans prendre la peine de jauger les dégâts sur le visage du vendeur qui s’attendait certainement à une victoire commerciale sans combats avec un butin en espèces sonnantes et trébuchantes à confier à son tiroir-caisse.
Mais j’aurais dû car c’eût pu être là la meilleure revanche à ma défaite.