« Flageolet » est à l’arrêt !
Qui est-ce ? Mais le gendarme zélé du spectacle de Guignol !
Celui que s’acharne contre « Sacripant », le voleur !
Napoléon III avait soumis ces divertissements à la censure pour encadrer leur liberté de ton à l’égard du pouvoir. C’est en grande partie à cause de cette exigence que la mémoire de Guignol n’a pas disparu : il a fallu écrire les textes pour pouvoir les présenter au contrôle.
Mais ma propre mémoire des dialogues s’est complétement effacée, à l’exception d’une séquence rituelle de toutes les pièces du répertoire : le moment magique pour le public miniature où Guignol lui demande de l’aider à trouver le voleur ou à innocenter une prise arbitraire de « Flageolet ».
– « Ouiiiiii ! »
– « Noooon ! »
– « Lààààààà ! »
– « Attention ! »
Quelle surexcitation, quel investissement ! C’est probablement le premier endroit où les enfants pouvaient exercer leurs bribes de justice, sans arrière-pensées, sans circonstances atténuantes ; une vérité manichéenne : le méchant est vêtu de noir, le gentil de blanc, en faisant appel à leur propre sens déductif. La vérité sans fard.
Devant les herbes folles qui assiègent le parterre du théâtre de plein air, je me demande quel autre spectacle peut se jouer ici ; peut-être celui de l’oubli et l’indifférence.
Il faut traquer le coupable ; les parents, les écrans ; un peu des deux sans doute.
Il faudrait mettre « Flageolet » sur le coup !
Guillemette Callies 