365 Nuances de 2019 – #150 – « Le vrai silence »

Un billet, court, chaque jour.

Au creux des confins escarpés de l’Hérault et du Tarn, dans une combe couverte de châtaigniers et de tilleuls en fleurs, le temps s’interrompt quelques jours, le vrai silence prend place.

Une seule fine route trace gracieusement un sillon au bas de la maison.  Les tilleuls massifs et les invasions d’herbes folles masquent avec application la douzaine de véhicules par jour qui se répartit en deux pics : celui matin et celui de la fin d’après-midi.
Le ciel est à peine effleuré, très loin, par une ligne aérienne ; un vol le matin et un vol le soir qui s’appliquent à se mettre en sourdine.

Pas une maison saillante en perspective, mais cependant, le troupeau de blondes qui paît dans un pli du paysage sous une chaleur écrasante aux accents orageux, laisse soupçonner une ferme dissimulée quelque part dans la moire de velours vert qui drape les versants d’abruptes collines.

Une très vieille bâtisse, assaillie de vigne vierge, flanquée d’une longue terrasse aux dalles disjointes, gardée sur un flanc par un jardin en terrasse et sur son autre flanc par une épaisse châtaigneraie, abrite ces quelques jours de retraite.

Le silence s’apprend vite.
Un silence serein presque totalement débarrassé d’agitation humaine.

Mais la nature n’est jamais calme, jamais muette.  De l’exubérance des oiseaux affairés aux bavardages chuintés des houppiers dissipés par le vent, de la frénésie des abeilles affamées autour des fleurs de tilleul aux frottements furtifs sur la pierre usée des lézards apeurés, chacun joue sa partition.

Aux premiers moments, ce silence – cette absence de bruits humains et cette discrétion que vous vous imposez à vous-même – étonne tant il est inhabituel.  Le silence se rend particulièrement prégnant la nuit puisque, en l’absence de tout éclairage artificiel, il s’alourdit de sa noire épaisseur.
Le silence, votre silence, devient alors extrêmement profond face à l’orchestre de la nature qui se manifeste sans repos même aux heures les plus sombres.
L’orchestre n’a pas besoin de vos notes.  Il joue sans vous et vous isole.

La magie jaillit doucement, à mesure que l’on cède l’archet, que l’on devient spectateur.
La magie du vrai silence qui laisse monter les notes indomptables de la nature, tout un solfège à apprendre sans partition.

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