Odyssée 2021 (#214) – « Telle est la question »

« Vivre avec nos morts » – Delphine Horvilleur, 2021 – Éditions Grasset

Où vont les morts ?
Telle est la question.  Que nous nous posons tous ; croyants ou non.

Delphine Horvilleur, rabbin, tisse au fil des pages la trame délicate, sensible, d’une de ses missions auprès des vivants : les accompagner dans leur confrontation avec la mort, celle de leurs proches.
Consciente de l’impuissance, de la limite du langage, elle s’efforce, à l’aune de la partie de sa mission qui côtoie tous les jours ce qui reste toujours un drame : la mort, de nous expliquer ce qu’en raconte sa Tradition, la religion juive.
Si le judaïsme peine à offrir une réponse catégorique sur l’« après », Delphine Horvilleur nous apporte ses réponses.

La Thora n’évoque explicitement ce « où » qu’en le nommant « shéol » : l’endroit où descendrait les disparus.  L’étymologie de ce terme signifie : « la question. »  Après notre mort, chacun tombe dans la question.
Et pourtant, cela laisse sans réponse.
Au travers des deuils qu’elle a eus à accompagner, elle dépeint toutes les explications, tous les rituels, tous les contes et, même, tout l’humour qu’offre la tradition hébraïque.
Elle explore la totalité du sujet des funérailles, ce rituel indispensable aux vivants dont ces temps de Covid nous ont cruellement privé.

Elle résume ce « où », avec la sobriété érudite qui est sa marque de fabrique et l’humour qu’elle partage avec Romain Gary, en ces quelques termes :
– « Pour chercher nos morts, il faut être capable de regarder simultanément dans toutes ces directions, sous terre comme au ciel, à la fin de l’histoire comme à son tout début.  (…)  Pour le judaïsme, l’impossibilité de la dire est ce qui raconte la mort. »

Et c’est ainsi qu’elle définit son sacerdoce : établir une lignée.  Inscrire les morts dans celle de leurs pères et inscrire les vivants dans celle de ceux qui les auront précédés.  Elle raconte leurs histoires, en hébreu « toledot » : engendrement ; ce que vous avez fait naître.

C’est là toute l’eschatologie du judaïsme : croire en l’avenir ; conjurer la peine dans l’espérance.
Delphine Horvilleur nous la partage avec des mots simples et thérapeutiques.

Votre commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Image Twitter

Vous commentez à l’aide de votre compte Twitter. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s